Hans Hartung, La peinture pour mémoire
Figure incontournable de l’art moderne et acteur marquant de l’abstraction, Hans Hartung (1904-1989) n’a eu de cesse, sa vie durant, de laisser derrière lui des souvenirs de son activité : un « autoportrait » en mots, qu’il publie en 1976, d’autres mots encore, des archives, des œuvres, entrelacés… Pour mémoire.
Ecrire sur Hans Hartung c’est suivre cet homme à la trace, c’est se confronter à ce legs, conservé aujourd’hui dans le lieu même de sa vie et de sa peinture : la maison qu’il a construite avec sa femme, l’artiste Anna-Eva Bergman, devenue Fondation Hartung-Bergman. Hartung voulait que cet endroit, et ce qu’il contenait, soient dédiés à la recherche.
Cette monographie, née de ce souhait, est la première de cette ampleur. Pierre Wat l’a pensée comme une longue conversation avec le peintre. Confrontant les dires, les archives et les œuvres, quelque chose de cette vérité de Hartung, celle qu’il voulait qu’on cherche, surgit.
Artiste prolifique, Hartung a laissé une œuvre immense, dont l’auteur a pu s’imprégner, pas à pas, année après année, parfois heure par heure, des premières aquarelles abstraites de 1922 au dernières toiles peintes à la sulfateuse de jardin, en 1989. Ce choix d’appeler dans chaque œuvre la mémoire d’un moment, d’un geste, d’une intention, a mis en évidence, au-delà des changements de rythme, de méthode, d’instrument, la continuité profonde qui guide le peintre, dès l’origine.
Le temps de Hartung est spiralé, il avance en prenant en compte le passé, afin d’en produire, sans cesse, la relève. Dans ce jeu entre connaissance et sensation, un artiste incroyablement singulier, loin des clichés « lyriques » qui lui ont longtemps collé à la peau, émerge. Un homme pour qui l’art est à la fois exploration et mémoire, enquête sur soi et captation du monde, infiniment.