The Blue Between the Red and Green | 1960

Subjugué par les Nymphéas de Monet au Musée de l’Orangerie en 1953, Sam Francis s’envoûte face à ces toiles géantes au cadrage resserré, débordantes de formes brumeuses. Dans The Blue between the Red and Green, la disproportion démesurée des ses grands aplats majestueux envahissent complètement le support de bord à bord et submerge le spectateur dans une rivière de couleurs.

En séparant les ruisseaux de rubis et d’émeraudes par un cobalt d’une pureté éblouissante, Francis cultive sa maîtrise du cercle chromatique pour engendrer une lumière ardente au sein de sa composition. Il réussit à garder un équilibre précoce entre les couleurs pour assurer l’harmonie de l’œuvre.

Indéniablement, la composition tripartite de The Blue Between the Red and Green, est un éloge de la couleur. L’explosion de rouge écarlate, de bleu azur et de vert électrique s’exalte et bouillonne sur la surface du support. Généreux et audacieux dans son application de l’acrylique, Francis renforce pourtant la luminosité de son œuvre en laissant transparaître le blanc du support. Tels des reflets étincelants sur l’eau, cela ajoute une nouvelle dimension de profondeur inattendue sur le papier.

Mouvementés par des coups de pinceaux vifs et rapides, les aplats de Francis suggèrent une gestualité fluide et frénétique. Il agrémente cette mer tumultueuse de fines éclaboussures vermeilles qui jaillissent tout au long de l’œuvre, laissant ainsi la spontanéité et le hasard compléter son travail. C’est cette fameuse expressivité gestuelle, exécutée en deux temps, qui démarque Sam Francis de ses contemporains.

C’est aussi dans les années 60 que l’artiste se lancera dans l’expérimentation en déclinant ce bleu outremer, si pur et si vénéré, pour aboutir à sa fameuse série « Blue Balls ». L’unique pigment cobalt représenté sur le papier est décliné en plusieurs nuances, sans pour autant perdre de sa pureté. En effet, Francis n’y ajoute pas d’autres couleurs, mais dilue simplement la peinture avec de l’eau afin de la manipuler grâce à l’air une fois posée sur le papier.

Sam Francis possède une facilité déconcertante pour combiner aplats de couleurs et jets de peintures afin de créer des compositions multidimensionnelles saisissantes. Tout au long de sa carrière internationale, Francis est resté fidèle à son abstraction singulière qui lui a permis de s’imposer comme l’un des artistes abstraits les plus référencés du XXème siècle.