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Centenaire | 1923 – 2023

jusqu'au 14 octobre 2023

L’art de Jean-Paul Riopelle est une expérience intime, invitant les spectateurs à sentir le froid, à entendre les bruissements de la nature et à ressentir l’immensité du paysage et la lumière qui le traverse. Il transcende les représentations traditionnelles de la nature pour transmettre l’impact et l’attachement émotionnel profond qu’il porte pour sa terre natale. C’est de cette nature prédominante qu’il puise son inspiration. La galerie A&R Fleury a choisi de présenter « C’est rocheux » en hommage du centenaire de la naissance de l’artiste parce qu’elle exprime parfaitement l’attachement qu’il porte pour les paysages hivernaux et témoigne de son audace picturale.

Cette œuvre est à découvrir à la galerie au cœur d’une sélection d’œuvres d’artistes étrangers ayant vécu à Paris et qui se sont également démarqués par leurs approches singulières de l’art abstrait.

Jean-Paul Riopelle (1923 – 2002)

C’est Rocheux, 1974

Huile sur toile

81 x 100 cm

Signée et datée en bas à droite :  « Riopelle 74″

Reproduit dans le catalogue raisonné p.143 sous le n°1974.050H.1974

“Tout au long de sa carrière, Riopelle a littéralement embrassé la matière. Il aimait avant tout le contact direct et spontané avec les éléments, y plongeant presque à pleine mains, sans outillage sophistiqué, à l’exception de certains couteaux qu’il faisait réalisé sur mesure.”

Adaptation extraite de la préface de l’ouvrage Jean Paul Riopelle: The Artist’s Materials, par Yseult Riopelle (2010), Los Angeles, Getty Publications, 2011.

La période mouvementée des années 1970 a été rythmée par les aller-retour de Riopelle au Canada, dont les paysages hivernaux inspirent une palette plus froide dans son œuvre et de nouveaux motifs inspirés de la culture autochtone. Toujours au plus près de la nature, les compositions colorées et riches en matière de Riopelle témoignent une approche de l’abstraction unique que, l’artiste lui-même, qualifiait « d’atmosphère Riopelle ».

Ce langage pictural abstrait de Riopelle ne fait que renforcer l’aspect impressionnant du paysage. Dans ses œuvres, ses aplats sont audacieux, assurés et imparables, et démontrent le respect et l’amour que porte l’artiste pour cette nature tout aussi spectaculaire.

Basil Zarov. Jean Paul Riopelle à l'atelier de Sainte-Marguerite-du-Lac-Masson, vers 1976. Bibliothèque et Archives Canada. © Succession Jean Paul Riopelle / SOCAN (2020). Photo © Bibliothèque et Archives Canada.

“Les voyages, ça fait un peu partie d'un rêve. Peut-être qu'on voyage pour trouver des titres aux tableaux qu'on a faits.”

Jean-Paul Riopelle, 1952

Jean-Paul Riopelle, C'est Rocheux, 1974, Galerie A&R Fleury, Paris

Dans les années 70, Riopelle a effectué plusieurs escales en hydravion pour explorer le Grand Nord. En haute altitude, à vue plongeante, il a pu observer des kilomètres de paysages hivernaux. Cela a influencé une évolution vers une palette blanche dans ses œuvres.

Les variétés de striations dans la matière sont formées par la fameuse technique au couteau et à la spatule développée par Riopelle. Façonnant ses outils, il les adapte pour créer des aplats plus ou moins épais sur la toile, dans notre œuvre, cela lui permet de produire une impression de strates de roches sédimentaires. Riopelle travaille l’impasto et étire sa peinture. Cela permet de rendre une texture hérissée intéressante sur la surface du tableau.

Cet empâtement de la matière est aussi propice à la dispersion des couleurs. Le blanc, dominant cette toile, ne fait que ressortir les accents de couleurs entremêlés entre chaque couche de peinture. Grâce au blanc, le tableau s’adapte à la lumière et à l’environnement qui l’entoure. Certaines couleurs se révèlent différentes selon l’accrochage.

Ce paysage rocheux de Riopelle nous rappelle presque les paysages précubistes d’un autre grand maître. Paul Cézanne a peint de nombreuses fois la nature « découpés » en coups de pinceau visibles et bien délimités. Il peint également des reflets aux teintes oranges et bleues sur la roche.

Riopelle utilise aussi différentes couleurs, dont le noir, pour ajouter plus de dimensions et de nuances à son œuvre. Il modernise la technique de Cézanne en la poussant encore plus loin, créant son paysage abstrait purement à partir d’aplats rectangulaires faisant ainsi référence à ses signatures mosaïques des années 50.

Paul Cézanne, Rochers près des grottes au-dessus du Château-Noir, 1904, Huile sur toile, 65,5 x 54,5 cm, © Musée d’Orsay, Paris

“Pour moi, l’unique référence, c’est la nature. La liberté n’existe que là, et en même temps la plus forte contrainte. Un arbre ne peut pousser que d’une seule façon. Il n’y a pas de façon tragique, ou élégiaque, ou joyeuse d’être un arbre. Il n’y a que la façon juste.”

Jean-Paul Riopelle

Joan Mitchell, Hemlock, 1956, Huile sur toile, 231,1 x 203,2 cm, ©Whitney Museum, New York City

Riopelle avait évoqué l’influence des œuvres de Monet dans son propre développement artistique.  Avec sa compagne Joan Mitchell, artiste de l’école des expressionnistes abstraits de New York, ils s’installent à proximité de Giverny — elle à Vétheuil et lui à Saint-Cyren-Arthies. Malgré leurs différences esthétiques, ensemble, ils traversent la fin des années 50 jusqu’à la fin des années 70, période d’épanouissement de leur art.

Rythmées par son geste énergétique et démesuré, les toiles de Mitchell deviennent des « expressions abstraites » de paysages. Cependant, l’expressivité du geste de Riopelle est plus contrôlée, structurée et agencée. À deux pôles opposés, ces deux artistes se complètent.

“Il n’y a pas d’abstraction ni de figuration: il n’y a que de l’expression, et s’exprimer, c’est se placer en face des choses. Abstraire, cela veut dire enlever, isoler, séparer, alors que je vise au contraire à ajouter, approcher, lier.”

Jean-Paul Riopelle, Catalogue de la Fondation Maeght 1990

À propos de l’artiste

Né en 1923 à Montréal, Jean-Paul Riopelle est l’une des figures majeures de l’art abstrait d’après-guerre, et certainement le plus important peintre canadien du XXe siècle. Proche un temps du mouvement automatisme et surréaliste, c’est à Paris, où il s’installe en 1947, qu’il se découvre de nouvelles affinités avec les pionniers de l’abstraction lyrique. Reconnu pour ses paysages mentaux, Riopelle s’est exprimé au travers de nombreux supports tels que la peinture, la sculpture et la lithographie.

En savoir plus

Photo: Heidi Meister, photographe, Joan Mitchell et Jean-Paul Riopelle dans le séjour de l’atelier-appartement de la rue Frémicourt, Paris, 1963. © Heidi Meister.

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