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Tête d’homme | 1924

22 - 27 novembre 2024

En exclusivité pour FAB Paris 2024, la galerie A&R Fleury exposait sur son stand une sculpture exceptionnelle d’Ossip Zadkine. L’œuvre était présentée en écho à l’exposition « Modigliani / Zadkine, une amitié interrompue » au musée Zadkine.

Réalisée quelques temps après la mort de Modigliani, elle évoque la profonde amitié entre les deux artistes et leurs influences communes, mais témoigne également du génie d’Ossip Zadkine, qui a marqué de son empreinte l’École de Paris et l’histoire de l’art moderne.

Ossip Zadkine (1888 -1967)

Tête d’homme, 1924
Albâtre
38 x 22 x 20 cm

“Zadkine découvrit que le drame de la création se joue entre trois protagonistes seulement : sa sensibilité, la matière et ses mains.
Avant toutes les notions et toutes les influences, il y a comme le statut primordial de la sensibilité.”

Maurice Raynal

Dans les années 1920, la figure humaine devient le sujet presque exclusif d’Ossip Zadkine. Tête d’homme est ainsi réalisée en taille directe dans de l’albâtre, pierre tendre que le sculpteur laisse s’exprimer à travers des arrondis et des incurvations qui paraissent suivre la forme de la matière première. Par contraste, les cheveux faits de stries irrégulières gravées dans la pierre soulignent encore davantage cet effet. Le visage dégage cette force particulière que le sculpteur parvenait à octroyer à chacune de ses pièces et que les critiques de son époque perçurent dès ses œuvres de jeunesse.

La simplicité des traits confère à la figure cette âme primitive chère à Zadkine, influencé par la sculpture romane, mais aussi « les fétiches nègres » et leurs « frères égyptiens, grecs et assyriens » — un syncrétisme qui trouve à l’époque sa source dans la découverte et l’incorporation de modes de représentation extra-occidentaux pour retourner à des formes jugées plus essentielles et originelles.

La dualité du visage, dont une partie est gravée et taillée, et l’autre plane et dessinée, évoque également cette inversion des volumes propre au cubisme. En 1921, Zadkine intègre le mouvement, longtemps rejeté au profit de sa propre sensibilité, et en adopte brièvement les codes. Son implication restera superficielle et l’artiste s’en détache dès 1924. Tête d’homme incarne ce retour de l’artiste à lui-même, aux formes plus naturelles qu’on lui connaît aujourd’hui, mais aussi au lyrisme singulier qui imprègne ses créations et qui s’exprime par ce travail de la matière caractéristique dans laquelle l’artiste puise toute sa force expressive.

Appartement d'Helena Rubinstein, 1952

 

 

 

 

 

 

 

À la différence du modelage où la sculpture se réalise à partir d’une matière informe, malléable et aisément modifiable, la taille directe met l’artiste en présence d’un matériau qui a déjà une masse, un volume, qui exprime déjà quelque chose par lui-même en raison de la longue histoire géologique inscrite en lui quand il s’agit d’une pierre et du phénomène de la croissance si c’est un bois.

 

 

Cette technique qui fut l’une des conditions du renouvellement de la sculpture au début du siècle permit la rupture avec la pratique généralisée de la transposition dans le marbre, non pas par l’artiste lui-même mais par des praticiens, de modèles en plâtre. Rodin lui-même était resté attaché à cette tradition. La taille directe, comme l’entendait Zadkine […] permet à l’artiste d’improviser son œuvre en la concevant au fur et à mesure qu’il l’exécute […], dans un état constant de spontanéité…

 

Ossip Zadkine, L’œuvre sculpté. Catalogue raisonné

Ossip Zadkine dans son atelier de la rue Rousselet, vers 1926. Photographie Marc Vaux © ADAGP

Zadkine dans son atelier de la rue Rousselet, accoudé à « Formes féminines » vers 1922. Photographie Marc Vaux. Archives du musée Zadkine © ADAGP

En 1924, Ossip Zadkine ne jure encore que par la taille directe. Principal représentant de la technique, elle lui octroie un rapport direct à la matière, le bois ou la pierre, et fait partie intégrante de son identité artistique et de sa manière d’envisager la sculpture. La forêt environnante de son enfance le dote d’une sensibilité particulière pour la nature et la matière. Plus tard en Angleterre, son expérience en ébénisterie lui procure un savoir-faire qu’il n’aura de cesse de parfaire.

Arrivé à Paris en 1910, il découvre également la scène parisienne et devient une figure de l’École de Paris. S’il tisse des relations avec ses pairs et admire certains artistes — Gauguin, Rodin, De Chirico, Modigliani… —, l’artiste conservera toujours une liberté d’exécution propre à lui-même et semblable à aucun autre sculpteur de son temps. 

Après des premières années à Paris difficiles, le sculpteur atteint peu à peu une maturité artistique qui s’ancre véritablement à partir des années 1920. Il affirme son style et une esthétique puissante guidée par son indépendance d’esprit. L’artiste trouve sa voie et rencontre un succès critique grandissant en France et en Europe, particulièrement en Angleterre, en Belgique puis, plus tard, aux Pays-Bas. Tête d’homme sera d’ailleurs intégrée dès 1927 dans la prestigieuse collection d’Helena Rubinstein, grande collectionneuse d’art et mécène, qui acquiert l’œuvre directement auprès de Zadkine.

L’étirement du visage, son aspect étroit, ses yeux étirés en amande, évoquent inévitablement les figures de Modigliani, à l’image de cette Tête réalisée en 1911-12. Contemporain de Zadkine, il devient son ami dans les années 1910 et partage avec lui les vicissitudes de la vie de jeune artiste. D’abord sculpteur puis devenu peintre, l’artiste adopte avec son camarade une esthétique née de sources d’inspirations communes et d’un goût particulier pour l’art extra-occidental.

Ces liens sont manifestes dans la Tête d’homme de Zadkine. Elle partage avec les sculptures et l’œuvre graphique de Modigliani cette simplicité extrême des lignes du visage qui participa activement au courant primitiviste du début du siècle. L’œuvre apparaît ainsi tant comme un hommage au peintre décédé prématurément en 1920, que comme le manifeste d’une proposition artistique radicale où se révèle la grande originalité de ces deux artistes qui ont marqué leur époque.

Amedeo Modigliani, Tête, 1911-12, calcaire

Atelier de la rue Rousselet, vers 1925

« Modigliani-Zadkine, une amitié interrompue », musée Zadkine, Paris, 2024 © Guy Boyer

Pour aller plus loin…

 

Le musée Zadkine présente l’exposition « Modigliani / Zadkine, une amitié interrompue » du 14 novembre 2024 au 30 mars 2025 et revient sur l’œuvre du peintre et du sculpteur à travers une sélection d’œuvres historiques réalisées au cours des années 1910 et 1920, auxquelles Tête d’homme fait pleinement écho.

L’exposition se concentre sur les influences croisées entre les deux artistes ainsi que sur leur amitié artistique, jamais explorée jusqu’alors, à travers près de 90 œuvres, peintures, dessins, sculptures mais également documents et photographies d’époque.

Actualités

MODIGLIANI / ZADKINE, une amitié interrompue

14 novembre 2024 - 30 mars 2025

Musée Zadkine, Paris

Après l’exposition dédiée à Chana Orloff, le musée Zadkine continue d’explorer les liens artistiques tissés par Zadkine au cours de sa vie. Cette exposition est la première à s’intéresser à une amitié artistique jamais explorée jusqu’alors, celle qui unit le sculpteur Ossip Zadkine au peintre Amedeo Modigliani. À travers près de 90 œuvres, peintures, dessins, […]

MODIGLIANI / ZADKINE, une amitié interrompue

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